Pour May et pour Siou
les morts m’encerclent
m’entourent comme un collier
une caresse de fleurs et de crânes
un peu comme les mots que nous tressons
par la langue ou par l’encre
les mots ne sont pas autre chose que cette sorte de guirlande
qui va son chemin
improvisé et inéluctable
à chaque ligne
à chaque mot
une fleur
un crâne
un deuil
un recommencement
combien de fois est-ce que j’ai couché avec la mort
combien de fois j’ai été tiré du lit juste avant sa caresse finale
Combien de fois elle m’a dit à la prochaine
nous sommes toustes des survivantes des rescapées en sursis
il y a toutefois des cultures
qu’on ne reconnaît pas toujours à l’œil nu
mais qui se distinguent par leurs morts
pour qui les morts violentes sont des morts naturelles
comme les vagues
qui portent leurs défunts comme du varech
plus souvent que d’autres
bien sûr j’aime à dire que j’aime me rappeler la mort
parce qu’elle est l’issue certaine d’une heure toujours incertaine
c’est supposé m’aider à prendre soin de la vie
à être attentif
c’est juste que je préfèrerais y penser dans d’autres circonstances
comme si elle me concernait moins
comme un bon wannabe bouddhiste authentique
j’essaie que
chacun de mes mots
soit une prière
aussi souvent que possible
un collier d’os et de caresses
pour les aimées ainsi allées
et à venir